AVANT LE NET ETAIT LA LETTRE ; comment communiquait-on au 19ème siècle aux Herbiers? (1)

Bon certes depuis 2017, il existe un merveilleux blog et un fabuleux site Facebook dédié à votre quartier!
Mais entre 1800 et 1900 (2) comment faisait les fermiers du hameau pour communiquer avec le reste du monde... euh tout du moins de la France?






LE CODE POSTAL VENDEEN ETAIT... le 79.
Le 4 mars 1790 est signé le décret d’application de la loi du 26 février 1790 relative à la création des 83 départements français (3).
Dans cette liste le département de la Vendée occupe le numéro 79 et non 85.
Ce numéro de département 79 s’ajoutait au nom de la ville de départ, écrit en linéaire, sur les lettres en partance.

Indicatif linéaire de départ "79 Noirmoutier" pour cette lettre.
A destination de Fontenay... le Peuple (Fontenay le Comte actuellement)














LE DESTINATAIRE PAYAIT BIEN SOUVENT LA TAXE DE TRANSPORT.

Auparavant et toujours à cette époque, les courriers étaient principalement expédiés en « Port Dû ». Ne pas faire payer la taxe par le destinataire  était considéré comme un manque de tact : cela laissait supposer des moyens limités

Deux P majuscules encadraient le numéro du département sur les lettres en « Port Payé ».


Remarque : la ville de départ est Napoléon (soit actuellement la Roche sur Yon).









DES BUREAUX DE POSTES ET DES BOITES POSTALE TOUT COMME AUJOURD'HUI.
Depuis le XVII siècle, le bureau postal des Herbiers était un bureau de direction. A ce titre il avait la charge de la levée et de la distribution du courrier sur son propre territoire mais également sur les communes rurales proches (Ardelay, La Gaubretière etc…).

Des boîtes postales existaient aussi. Ces dernières avaient la même utilité que les boîtes postales actuelles jaunes disséminées dans notre commune. A la différence près que les boîtes d'alors contenaient un "tampon" (rappel, on dirait un "timbre" en lexique de marcophilie) sur lequel figurait une lettre alphabétique dans l'ordre de la tournée du facteur. Cette oblitération était le moyen pour l'administration de savoir si le facteur avait correctement effectué toute sa tournée. Ces lettres étaient entourées d'un rond (boîtes rurales 1830 à 1912).

Boîte postale actuelle.


1960 (une enveloppe et un feuillet)


Remarquez l'indicatif de boîte rurale B des Epesses sur l'enveloppe (dans le rond en haut à droite).


Qui peut aujourd'hui se vanter de pouvoir écrire de telle manière?

Que ce soit la tournure ou la graphie.

Un entrepreneur de travaux publics (ou agricoles) informe son client de l'achèvement des travaux (fossés autour de fermes) et l'invite à venir constater. Je ne sais s'il maniait la pelle lui-même? Mais, chose certaine, il maîtrisait la plume!











CURIOSITE DANS LE SECTEUR DES HERBIERS : UN BUREAU DE DISTRIBUTION DE POSTE D'UN GENRE PARTICULIER, CAR SITUE CHEZ LE PARTICULIER!
La responsabilité du bureau postal de direction des Herbiers s’étendait également à quelques bureaux de distribution, dont celui du "Fougerais".


1829 - 1839 - 1842 (trois enveloppes, les courriers ayant moins d'intérêt pour illustrer le sujet)




« Sous le Premier Empire, lors de la réorganisation du service des Postes et voitures publiques en Vendée, le bureau de distribution des Essarts fut supprimé et transféré le 1er janvier 1814 au hameau des Quatre-Chemins de l'Oie. Le changement fut obtenu par le crédit de Mr. du Fougerais, admis au Corps Législatif pour la Vendée le 21 mai 1811, qui habitait le château de ce nom près du village de l'Oie.

La nouvelle distribution ainsi créée prit le nom de LE FOUGERAIS.
Bureau de distribution le 1er janvier 1814 »

D’après Maurice BRUNO de l'A.P.Y. avril 1988






LES GUERRES LAISSENT LEURS TRACES AUSSI DANS CE QU'IL RESTE DE LA CORRESPONDANCE.
Les marques sur lettres des Herbiers de 1792 à 1797 sont rares car « le bourg est enveloppé dans l’insurrection et presque toutes les maisons sont détruites par des incendies. » M. Bruno.




QUELQUES AUTRES COURRIERS :

1806 (une enveloppe et trois feuillets de correspondance)
La Gendarmerie veut s'établir à la Pommeraie.
Où comment le lieutenant de Gendarmerie des Herbiers rend compte à son supérieur de la Roche sur Yon (capitaine) de son avancée dans la recherche d'une maison appropriée pour l'installation d'une brigade à la "pommeray" (la pommeraie sur sèvre?). Le maire de cette commune demande donc au préfet de Vendée l'autorisation de pouvoir expulser le locataire de la maison au terme de son bail. Précision utile, le propriétaire est aussi adjoint à la mairie de la même commune...


1853 (une enveloppe et un feuillet)
De la difficulté de mener ses affaires et de bien se comprendre lorsqu'on est distant.
"Cher Narcisses, Veuilles donc être assez obligeant de m'écrire lundi matin jour de foire de Tiffauges tu remettras la lettre à mes parents qui la remettront à nos meuniers qui me la donneront à Tiffauges (il faudra leur donner dimanche soir). Tu me diras dans cette lettre s'il est utile que j'ailles à Montfaucon et si tu as vendu. Veuilles faire ton possible, tu obligeras celui qui a l'avantage de t'écrire
Ton ami tout dévoué M. Breteaudeau Directeur de la compagnie du cheptel (?) pour le département de la Vendée"
Ouf, j'espère que tout est clair pour vous?!


1854 (une enveloppe et un feuillet)
Lumière sur le précédent courrier
La précédente lettre et celle-ci 10 mois plus tard chargent donc le correspondant Narcisses Mollat (habitant Montfaucon sur Moine en Maine et Loire) de vendre pour 4000 francs au moins un pré de 2 hectares 60 ares situé à Montigné pour le compte de M. Breteaudeau des Herbiers.


1857 (une enveloppe et un feuillet)
Vente par correspondance
Remarquez l'apparition du timbre postal (4) :
"20 centimes bleu Napoléon III non-dentelé"
Supplément d'une commande précédente de mercerie (rubans, fils). Les quantités, descriptifs des produits ainsi que les délais souhaités pour leur expédition. Un petit rappel pour ce qui n'a toujours pas été expédié de la 1ère commande, quelques recommandations sur le soin à apporter à son traitement : on se croirait dans un SAV contemporain!


Cinq autres correspondances non publiées ici traitent d'affaires courantes. Avec des avoués (= avocat), des huissiers, des paiements expédiés en espèces...
Et oui l'heure n'étaient pas vraiment à la dématérialisation des communications ou des transferts d'argent!



Pour conclure sur ce 19ème siècle qui a vu le développement et de multiples réorganisations du système postal, seules les personnes lettrées (clergé, noblesse, notaires, avoués, officiers, ...) sont en capacité d'échanger par écrit.
Et oui, l'heure n'est pas encore à la démocratisation des modes de communication!
Le 19ème siècle, une époque où la correspondance était encore rare, coûteuse, fastidieuse et lente.
En contrepartie elle se devait d'être obligatoirement utile, précise et concise.





De quoi apprécier combien la fée électricité en 2017 a réduit les distances, enrichie les échanges, facilité l'accès au savoir.

En revanche le fourmillement des parutions et d'auteurs consultable sur les réseaux, cette boulimie de communication en tout sens en rendent le tri nécessaire, la qualité des contenus aléatoire et parfois la déconnexion salvatrice.








ANNEXES :

(1) Cet article est rendu possible par le prêt de la documentation collectée par C. G.
Les explications patiemment dispensées pour m'aider à comprendre le sens à donner à ces écrits, ces enveloppes et les différentes marques qui y sont apposées ont été précieuses. Merci à lui.
Tout d'abord un éclaircissement sur la spécialité de notre historien et collectionneur : la marcophilie. (Non Marco pas d'inquiétudes, ton intégrité physique n'encourt aucun risque!)
La marcophilie peut se définir ainsi (cf Wikipédia) : "c'est l'étude des marques postales. A savoir, toute annotation portée sur une lettre par le service postal qui l'achemine. Les marques les plus communes sont les timbres-poste (qui peuvent être imprimés) et l'oblitération. D'autres signalent une communication entre agents postaux (nouvelle adresse, retour à l'expéditeur, taxe à récupérer, etc.) ou une explication pour l'usager (cause du retour d'un pli, d'un retard, d'un dommage, etc.)."

(2) Histoire (sommaire) des Postes :
Pour communiquer, en dehors des gestes et de la parole, il ne reste alors que l'écrit.
A distance, celui-ci ne pouvait donc être transmis matériellement qu'à pied, à cheval, par les airs (pigeons voyageurs), par bateaux.
Ce transport pouvait être effectué par des personnes privées, ou plus tard par l'état : c'est la Poste.
En France c'est Louis XI qui le premier met en place un système de relais de chevaux répartis à intervalles réguliers (en latin "posta").
Améliorations successives sous le règne d'Henri IV (Guillaume Fouquet) et sous Louis XIV (Louvois).
Très vite on mentionne le nom de la ville de départ à la main puis à l'aide de tampons en bois puis en métal (ces marques apposées sont nommées "timbres" dans le vocabulaire exact de marcophilie).
On exprimera ensuite rapidement le besoin de connaître le lieu et la date d'arrivée.
Enfin ce fut la date de départ qui sera précisée, ce fut le début des cachets à date.
Les tarifs d'expédition étaient déterminés par la distance de transport et le poids du colis. Le cachet mentionnant le lieu (et le jour) de départ avait donc toute sont importance.

(3) Evolution du nombre de départements français :
En 1790, le nombre de départements n'est que de 83 initialement.
Pois, le nombre de département grimpe progressivement à 134 avec les annexions territoriales de la République puis de l'Empire napoléonien en Allemagne, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas, en Suisse, en Belgique et au Luxembourg.
Chute de l'Empire en 1815, nous retombons à 86 départements.
En 1860, rattachement du comté de Nice et du duché de Savoie (séparé en 2 départements) qui ramène le nombre à 89.
Suite à la défaite de 1871 (guerre franco-prussienne ou allemande), des territoires sont perdus et le nombre de départements rechute à 86.
Voilà pour les années 1800, et ainsi de suite, le nombre de département français évolue encore de nos jours!

(4) Apparition "timbre postal" au milieu du 19ème siècle :
Dans la première moitié du XIXème seuls les cachets (rappel on les nomme "timbre" en marcophilie, mais il s'agit bien là d'une oblitération par un tampon) existaient. Vous ne trouverez pas de timbres postaux (petit carrés de papiers collés sur le pli à expédier tel que nous les connaissons aujourd'hui) avant 1849 en France... ils n'existaient pas! Ce sont les anglais en 1840 qui imposent les premiers cette "vignette postale" (le timbre postal) preuve de paiement de l'acheminement. Ce système est imaginé en Angleterre par Rowland Hill en réaction à des courriers en port dû non réglés par les destinataires (ces derniers se contentaient des informations contenues sur l'enveloppe). L'apposition du timbre postal devient la preuve du paiement initial de la taxe d'expédition par l'expéditeur. La mention "PP" avait auparavant la même fonction.




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